(Wal Fadjri, octobre 2002)
J’ai lu dans « Le Soleil », la semaine dernière,
une déclaration du ministre de l’Intérieur : “Tout
chauffeur pris en délit de surcharge sera sanctionné…”
Comme tout Sénégalais, je salue cette décision. «
Il n’est jamais trop tard. » Mais j’aimerais attirer l’attention
de cet éminent ministre sur certaines réalités qui pourraient
lui échapper.
Pour ce qui est des contrôles sur les routes, surtout nationales, tout
« Sénégalais d’en bas » sait que les policiers
et gendarmes font leur « devoir » avec un zèle qui dépasse
toute attente. Monsieur le ministre, vous n’avez qu’à prendre
les transports populaires pour vous en rendre compte. Vous comprendrez qu’il
n’est nul besoin de renforcer les contrôles. Nos agents n’arrêtent
certes pas les voitures des ministres et des grands patrons, mais toutes les
autres y passent. Et je peux vous assurer, monsieur le ministre, qu’ils
contrôlent tout. Nombre de passagers, « codes », phares,
clignotants, roue de secours, boîte de pharmacie, quantité de
bagages, vignette, carte grise, permis de conduire. Panneau Stop non respecté,
vitesse trop grande. De vrais techniciens, nos agents. Rien ne leur échappe.
Ils trouvent toujours quelque chose qui cloche.
Déguisez-vous en chauffeur de « Ndiaga Ndiaye », monsieur
le ministre, et vous en apprendrez des choses. Nos vaillants agents vous arrêteront
à l’entrée et à la sortie de chaque commune et
inspecteront votre véhicule dans ses moindres détails. Même
un bébé dans les bras de sa mère sera une surcharge.
Et quand vous estimerez que vous êtes en règle, ils diront que
vous n’avez pas une croix rouge sur votre boîte à pharmacie
ou que vous n’avez pas assez de coton. Comme je l’ai dit, ils
trouvent toujours quelque chose. Tout dépend de la tête du chauffeur.
Le problème est ailleurs. Si vous voulez aller jusqu’au bout
de votre logique, je crains qu’il n’y ait plus d’hommes
en uniformes aux bords des routes. La plupart de nos agents n’effectuent
des contrôles que pour arrondir leurs fins du mois. Ignorez-vous cela
?
Mais voici quelques conseils pratiques que je me permets de donner à
votre excellence.
· Quand un agent vous fait signe de « droiter », prenez
soin d’avoir un billet de banque en main. Et regardez bien l’uniforme.
Il ne faut surtout pas confondre un policier et un gendarme. Le tarif n’est
pas le même. Prenez note. Il faut glisser discrètement un billet
de cinq cents dans la main du policier et mille dans celle du gendarme. (Tout
gendarme qui se respecte ne prend pas moins de mille francs.) Mais c’est
plus élégant de placer le billet de banque dans ses papiers
( permis et autres) qu’on remet respectueusement à l’agent
en lui demandant comment va sa famille. Si vous suivez ces conseils, vous
pourrez faire tout ce que vous voudrez sur la route.
· Et puis, un dernier conseil, monsieur le ministre : Contrôlez
d’abord vos agents. Alors seulement pourrons-nous dire que « rien
ne sera plus comme avant. »
Bathie Ngoye Thiam.